LA TVA, INJUSTE OU GÉNIALE ?
Qu’elle soit l’une ou l’autre, la TVA n’en a pas moins fait le tour du monde, faisant aujourd’hui partie de l’acquis communautaire, c’est-à-dire que les Etats membres de l’Union européenne ont dû s’engager à l’introduire dans leur système fiscal.
Elle est réputée injuste par les socialistes, parce qu’elle frappe tous les produits consommés, donc ressentie de façon inégalitaire par les riches et par les pauvres ; elle est dite géniale par les économistes éclairés parce qu’elle favorise l’exportation des produits fabriqués intra muros.
Ce ressenti par les pauvres est-il justifié ?
Oui, si l’on considère que toute augmentation de TVA est automatiquement répercutée sur le prix de vente des produits. Non si l’on considère la réalité de la formation des coûts qui s’énonce en fonction de l’offre et de la demande. L’expérience des applications passées montre que la répercussion sur les prix de vente, si elle est marginale, reste aléatoire et in fine assez supportable.
Quel mécanisme montre qu’elle est équitable ?
Inventé en 1954, cet impôt taxe non pas le chiffre d’affaires de l’entreprise (comme c’était le cas avant son invention), mais sa valeur ajoutée, c’est-à-dire la différence entre ce qu’elle produit (et vend) et ce qu’elle achète à l’extérieur pour produire (consommations intermédiaires).
Il n’y a donc aucun effet d’“empilage”: l’entreprise déduit de la TVA qu’elle reverse au Trésor public le montant de la TVA déjà supportée par ses consommations intermédiaires.
Pourquoi la qualifier de géniale ?
Parce qu’elle ne s’applique pas à l’export, favorisant ainsi l’expansion de notre système productif. En effet, quand nous exportons une voiture fabriquée en France, son prix inclut les charges sociales françaises mais pas la TVA. Notre intérêt est donc, pour vendre nos produits à l’extérieur, à ce qu’il y ait moins de charges sociales en France (non déductibles) et plus de TVA (déductible). Le raisonnement inverse s’applique à l’importation.
Quels sont les ressorts de la compétitivité ?
Face à la concurrence intra et extra muros, l’un des facteurs déterminants de notre compétitivité, c’est le coût du travail (salaires + charges) qui est plus élevé chez nous que chez la plupart de nos concurrents européens et notamment qu’en Allemagne.
La première composante n’est pas en notre défaveur vis-à-vis de l’Allemagne où les salaires sont en général plus élevés que les nôtres ; la seconde composante est seule en cause, parce que les charges sociales qui pèsent sur les salaires ont atteint en France un niveau insupportable.
Quelle conclusion en tirer ?
Nous sommes donc condamnés, à réformer drastiquement le financement de notre protection sociale en transférant plusieurs dizaines de milliards d’euros des cotisations assises sur les salaires vers un autre impôt à assise large. Le gouvernement a fini par l’admettre, après avoir commencé à faire exactement le contraire (par exemple en augmentant les cotisations retraite pour payer le prix du retour partiel à la retraite à 60 ans, ou en annulant le transfert des cotisations d’allocations familiales vers la TVA voté sous la précédente législature). Ceci sans préjudice des nécessaires efforts de rationalisation de la dépense sociale, s’agissant par exemple de la prescription des médicaments ou de l’utilisation des génériques.
Vers quel impôt opérer cet inéluctable transfert?
Si 2 à 3 dizaines de milliards doivent être trouvés, il n’y a que deux solutions : la CSG ou la TVA.
La CSG est une mauvaise solution car elle frappe, pour les 3/4 et de manière proportionnelle, les revenus du travail. Elle n’a donc aucun effet positif sur notre compétitivité extra muros.
La bonne solution, c’est la TVA qui est en fait la TVA-compétitivité.