Parcours
+ Parcours lévinassien
+ Parcours axiologique
+ Parcours cartésien
+ Parcours hellénique
+ Parcours ricordien
+ Parcours spinoziste
+ Parcours habermassien
+  Parcours deleuzien
+  Parcours bergsonien
+ Parcours augustinien
+ Parcours braguien
+ Glossématique
+ Synthèses
+ Ouvrages publiés
+ Suivi des progrès aux USA
+ Parcours psychophysique
 -  L'art et la science
+ Parcours nietzschéen
+ Philosophies médiévales

Autres perspectives
+ Archéologie
+ Economie
+ Sciences politiques
+ Sociologie
+ Poésie
+ Théologie 1
+ Théologie 2
+ Théologie 3
+ Psychanalyse générale
+ Points d’histoire revisités
+ Edification morale par les fables

Mises à jour du site
17/11/2014 ajout:
Parcours braguien
- Sagesse du monde (2)

09/11/2014 ajout:
Parcours braguien
- Sagesse du monde (1)

21/10/2014 ajout:
Parcours braguien
- Nos bases intellectuelles et cultuelles

14/10/2014 ajout:
Parcours braguien
- La romanité de l'Europe (3)

07/10/2014 ajout:
Parcours braguien
- La romanité de l'Europe (2)

30/09/2014 ajout:
Parcours braguien
- La romanité de l'Europe (1)

29/09/2014 ajout:
Parcours braguien
- La tradition
- Dialogue interreligieux

22/09/2014 ajout:
Parcours braguien
- Eduquer pour la liberté

09/09/2014 Nouveau parcours:
Parcours braguien
- Présentation
- La vérité dans ses différents contextes

08/09/2014 ajout:
Philosophies médiévales
- La défense d'Averroès

01/09/2014 ajout:
Philosophies médiévales
- Averroès et le discours décisif

Liens Wikipédia

Visites

 408288 visiteurs

 11 visiteurs en ligne


L'art et la science - L'ordre caché de l'art 2


L’ORDRE CACHÉ DE L’ART (2)
 
SOMMAIRE
 
III/ LA FRAGMENTATION DE L’ART MODERNE
Avant l’avènement de l’art moderne
Le dilemme auquel l’art moderne est confronté
L'action painting prise comme exemple d’une composition consciente soumise à une disruption presque totale
Précédant l’action painting, le Cubisme vient s’inscrire dans la démarche disruptrice
Précédant le Cubisme, l’Impresssionnisme français vient marquer le début de la disruption dans l’art moderne
 
III/ LA FRAGMENTATION DE L’ART MODERNE
 
Avant l’avènement de l’art moderne
 
Avant cet avènement aucun conflit ouvert (dissociation) n’opposait la sensibilité de surface à la sensibilité de profondeur, l’intellect à l’intuition. La gestalt consciente de surface gardait dans le passé, assez de souplesse pour accommoder, sans effort excessif, les contributions du processus primaire. On ne connaissait pas alors l’expérience du chaos ou de la disruption. Cependant, même dans l’art ancien, la disruption se devine toute proche de la surface et éclate au grand jour, pour peu que nous refusions d’abandonner la forme normale de notre sensibilité, qui est déterminée par la gestalt. Déjà, des forces de distorsion travaillaient l’œuvre de Michel-Ange.     
 
Le dilemme auquel l’art moderne est confronté
 
Selon Ehrenzweig, l’art moderne est tout intellect ou toute spontanéité, rarement les deux à la fois. L’artiste moderne attaque ses propres facultés rationnelles pour faire place à un développement spontané. Il s’agit ici d’un cercle vicieux :
     –   les facultés de surface attaquées, prennent les armes pour se défendre et, du jour au lendemain, la percée spontanée venue d’en-bas se transforme en nouveau procédé délibéré, maniériste ;
   celui-ci interdit à son tour toute spontanéité ultérieure et doit être détrôné par une nouvelle explosion venue des profondeurs.
Il est bien difficile de décider laquelle de ces dispositions est à l’origine de ce cercle vicieux :
–   s’agit-il d’une position défensive initiale du contrôle conscient,
   ou d’une disruption des fonctions profondes.
Elles se renforcent et se suscitent l’une l’autre. La croûte superficielle de maniérisme interdit aux fonctions spontanées des profondeurs de respirer librement, il faut donc la soumettre à une disruption totale ; et cette victoire totale des fonctions profondes provoque les fonctions de surface à une action défensive tout aussi énergique.
Ehrenzweig se propose de revenir plus tard sur cette couleur nettement schizoïde de l’art moderne, qui explique la dissociation parfois extrême des fonctions de surface et des fonctions profondes. 
 
L'action painting[1] prise comme exemple d’une composition consciente soumise à une disruption presque totale
 
L'action painting représenta, à l'époque, une éruption soudaine de la substructure inconsciente de l'art. L’interprétation des textures inarticulées comme produit de l'inconscient aurait pu servir à prouver que l’action painting, plus que tout autre type de peinture, manifestait très directement les principes inconscients de la forme. On aurait pu le dire du moins tant que l’action painting était un mouvement jeune et fruste. Mais il a suffi de quelques années pour que se mette en place l'inévitable réaction défensive du processus secondaire. L'action pain­ting, qui est aujourd’hui à la mode n'est guère plus qu'un exercice très délibéré de textures décoratives, assez fermé à la discipline inconsciente de forme qui l'animait à l'origine.
 
Précédant l’action painting, le Cubisme vient s’inscrire dans la démarche disruptrice
 
On avait déjà assisté auparavant à des éruptions d'élé­ments de forme inarticulés et impossibles à focaliser. Sir Herbert Read[2], dès les années 1930, signalait une incompatibilité entre une partie de l'art moderne et les enseigne­ments de la psychologie de la forme. Les psychologues de la gestalt, en effet, avaient soutenu que l'art, plus que toute autre activité humaine, attestait le combat fondamental de l'esprit humain pour l'organisation stable, compacte et simple d'une « bonne » gestalt. Il suffit à Sir Herbert, pour réfuter cette assertion, d'attirer l'attention sur ce qu'il appelait l'effet de l'œil baladeur que suppose le cubisme de Picasso. Le Cubisme en effet s'est lui-même dévoyé pour refuser à l'œil les points de focalisation fixes qui pouvaient servir de pivot au reste de la composition. Au lieu de cela, on envoyait promener l'œil. Dès qu'il se fixait sur un trait, les fragments cubistes composaient un nouveau pattern qui éclatait à son tour quand l'œil, en poursuivant son chemin, se faisait accrocher par un nouveau trait. Le tableau se soulevait et se creusait sans cesse devant l'œil qui s'efforçait d'introduire dans le pattern un peu de stabi­lité.
Le Cubisme, dans son premier impact, attaquait la sensi­bilité consciente et le principe de la gestalt qui la règle. Si nous ne nous prêtons pas à cette attaque, nous ne pou­vons prendre plaisir aux tableaux ni devenir réceptifs au ordrecache2fig1.jpgnouvel espace, extrêmement mobile, créé par le Cubisme.
Avec cette ondulation du plan pictural vers l'intérieur et l'extérieur, se manifeste peut-être pour la première fois le nouvel espace pictural que révélera pleinement la peintureplus tardive de Jackson Pollock[3] (ci-contre Pasiphaé 1943) et de son école. Notre ten­tative de focalisation doit le céder à !a  vacuité de ce regard fixe qui embrasse tout et qu’Ehrenzweig a décrit comme le signal conscient du scanning inconscient. Un tel type d'investigation profonde peut dominer l'impression super­ficielle de chaos et de disruption et apprécier la discipline formelle rigoureuse qui est sous-jacente. Cet ordre caché compense le caractère quasi schizoïde de l'excessive fragmentation qu’offre, pour une bonne part, l'art moderne.
 
Précédant le Cubisme, l’Impresssionnisme français vient marquer le début de la disruption dans l’art moderne
 
La peinture classique avait accentué la cohérence de la ligne et de la surface pour s'épanouir dans les harmonies linéaires d'Ingres. Les Impressionnistes, eux, ont fait éclater toute cette cohérence de la ligne et de la surface pour accentuer la signification de chaque coup de pinceau, et ont usé librement de la fragmentation du plan pictural en éparpillant sur la toile ces coups de pinceau isolés. Nous ne ressentons plus aujourd'hui avec autant d'acuité la sévérité de leur attaque contre les facultés conscientes et nous ne pouvons qu'en deviner la violence, par la réaction des aca­démiciens et de leur cercle. Au bout d'une dizaine d'années environ, avec le temps, et les bons offices de la critique qui soutint le mouvement, leur attaque perdit de sa viru­lence. Les Impressionnistes découvrirent qu'ils pouvaient regrouper les coups de pinceau épars et composer des patterns stables, en prenant du recul vis-à-vis de la toile et en laissant les coups de pinceau se figer à nouveau en surfaces et en contours fermes. Les critiques d'art déclarèrent alors que les Impressionnistes,loin de disperser la cohérence du plan pictural, avaient en fait construit un nouveau type d'espace atmosphérique qui valait largement en pré­cision et en stabilité, l'espace jadis déterminé par les règles de la perspective propres à la Renaissance. Beaucoup de peintres postimpressionnistes se laissèrent aller à une cons­truction délibérée de l'espace, mettant ainsi un terme au traitement spontané d'un plan pictural oscillant librement. Seul Monet, sur sa fin, sut faire céder la barrière et ressus­citer dans ses derniers Nymphéas la vibration perdue de l'espace pictural. Une fois encore, on put voir les coups de pinceau, lâchés en constellations aérées, parcourir le tableau de leurs oscillations libres. Il n'est plus étonnant, dès lors, qu’on ait ensuite salué en Monet un des précur­seurs de la sensibilité moderne.
Nous avons vu que le Cubisme de Picasso, par l'usage qu'il faisait d'éléments quasi géométriques pour remplacer un travail spécifique au pinceau, repartit à l'attaque de notre sensibilité consciente. Le Cubisme dégénéra à son tour en un exercice académique de construction de l'espace. Durant les années vingt et trente, l'enseignement académi­que chercha à vérifier partout s'il était possible, selon la remarque de Cézanne, de voir la nature dans les éléments (cubistes) de sphères, cylindres, etc. Aujourd'hui encore, on attache de la valeur à ce type de nu qui convertit systéma­tiquement les formes organiques en cylindres, cubes rigi­des, etc., exercice particulièrement ennuyeux qui consiste à construire un espace géométrique où manqueraient toute la fragmentation antérieure et les ordrecache2fig2.jpgeffets de l'œil baladeur. Presque tous les peintres de l'entre-deux-guerres eurent leur phase de construction cubiste de l'espace. Cette décadence explique que Jackson Pollock ait donné une impression si vivifiante en pulvérisant une nouvelle fois le Cubisme académique solidifié, et en filant les rideaux arachnéens de son espace. Un va-et-vient incessant les animait devant l'œil, errant une fois de plus à la recherche de points fixes de focalisation. Le processus secondaire réagit à la plus violente des attaques avec une brutalité tout aussi impitoya­ble et en peu d'années s'émoussa l'effet de brouillage. Les rideaux mobiles de son espace se fondirent sagement en une texture épaisse et ferme pour offrir à l'étalage d'un élégant mobilier l'arrière-plan le moins gênant. L'attaque du principe de la gestalt fut ensuite organisée en termes très explicites, presque scientifiques, par l'Op-art et ses effets de brouillage, qui interdisaient radicalement la focalisation sur un quelconque élément, fût-ce pour l'instant le plus bref. Aussi un critique d'art avança-t-il qu'on ne pourrait supporter un certain tableau de Bridget Riley, ci-dessus [L’Automne, 1963] aujourd'hui à la Tate Gallery, que dans un décor domestique, en lecachant derrière les rideaux. Je n'en crois rien. Le processus secondaire réussira sans aucun doute à surmonter jusqu'à cette ultime attaque contre la percep­tion consciente de la gestalt et convertira ces tableaux en éléments décoratifs de tout repos.
Une fois que le processus secondaire aura fait son œuvre, nous aurons autant de mal à comprendre les effets produits en son temps par ce brouillage irritant que nous sommes surpris de la réaction de Kandinsky devant les Meules de foin de Monet : il en eut la vision brouillée au point d'être incapable de retrou­ver les meules de foin, dans la profusion des coups de pinceau. Le futur nous réserve-t-il une nouvelle vague d’attaques contre notre sensibilité de surface ? Ehrenzweig, pour sa part, n’y croit guère. L’art moderne se meurt.
 
 
 


[1]L'Action painting, traduit littéralement par peinture active, désigne aussi bien une technique qu'un mouvement pictural. C'est un art abstrait apparu au début des années cinquante à New-York. Ce terme a été proposé en 1952 par le critique américain, Harold Rosenberg, pour caractériser l'importance de la gestualité.
Cette attitude artistique privilégie l'acte physique de peindre. Les suggestions figuratives sont écartées. Les artistes réalisent ces œuvres abstraites en peignant, égouttant ou projetant de la couleur sur la toile. La structure du tableau résulte de l'intuition de l'artiste mais aussi des divers comportements de la couleur (coulures…). L'énergie vitale et la psyché qui animent le corps du peintre constituent le moteur, la ressource et le sens du travail. Peindre apparaît alors comme un moment d'existence irréfléchi et pulsionnel. L'œuvre est un témoignage du corps vivant, en action et en mouvement dans l'instant.
[2] Sir Herbert Read, (1893-1968) était poète et critique de la littérature et de l'art. Il fut l'un des premiers écrivains anglais à prendre connaissance de l'existentialisme. Read était (et reste) mieux connu comme un critique d'art. Il était lié à de nombreux artistes britanniques modernes comme Paul Nash , Ben Nicholson , Henry Moore et Barbara Hepworth . Il devint membre associé du groupe Nash Unit One et fut professeur de beaux-arts à l'Université d'Edimbourg (1931-1933). Sa nature idéaliste le conduisit à s’intéresser àla psychanalyse. Read est devenu pionnier dans le monde anglo-saxon pour l'utilisation de la psychanalyse comme un outil pour l'art et la critique littéraire. Freudien à l'origine, il fit allégeance à la psychologie analytique de Carl Jung , devenant à la fois éditeur et rédacteur en chef de ses œuvres complètes en anglais
 
[3]  Jackson Pollock (1912-1956), certainement la figure principale de l’Action painting. Il en utilise une forme, celle la technique du « dripping », technique dans laquelle la couleur est projetée (par un bâton trempé dans la couleur) de manière contrôlée sur une toile posée à même le sol.
 






Date de création : 05/01/2014 @ 18:37
Dernière modification : 05/01/2014 @ 18:51
Catégorie : L'art et la science
Page lue 399 fois


Prévisualiser la page Prévisualiser la page     Imprimer la page Imprimer la page


^ Haut ^

Initiationphilo - site d'initiation à la philosphie - Henri Duthu
contacter le webmaster : webmaster@initiationphilo.fr

  Site créé avec GuppY v4.5.18 © 2004-2005 - Licence Libre CeCILL

Document généré en 0.04 seconde