HISTOIRE DE L’ÉLECTRICITÉ ET DU MAGNÉTISME
L'histoire de l'électricité et du magnétisme est plus ancienne que celle des autres interactions : au Ve siècle av. J.-C., le philosophe grec Thalès de Milet observe qu'en frottant un morceau d'ambre (elektron en grec) sur du tissu, l'ambre acquiert une propriété inhabituelle : il attire des petits morceaux de paille. Le même phénomène d'électrisation se produit quand on se peigne les cheveux par temps sec (le peigne attire les morceaux de papier) ou quand on enlève un pull (on peut entendre ou même voir des étincelles). La foudre est la manifestation la plus spectaculaire de ce phénomène.
Thalès de Milet (vers 625-547 av. J.-C.), mathématicien et philosophe grec, cherche des interprétations scientifiques aux phénomènes naturels, effectue desobservationsastronomiques,préditdes éclipses, démontre des théorèmes en géométrie. Il est considéré comme le fondateur des sciences.
À la même époque, en Asie mineure, et probablement bien avant en Chine, un autre phénomène surprenant est observé : des fragments d'une roche, la magnétite, ont la propriété étonnante de s'orienter toujours dans la même direction si on les pose sur du bois flottant sur l'eau. Cette propriété a été exploitée pour aider les navigateurs à s'orienter : c'est le principe de la boussole.
Les expériences de Luigi Galvani sur les cuisses de grenouille et l'invention de la pile électrique par Alessandro Volta aboutissent à la compréhension des phénomènes de transport des charges par les courants électriques.
Luigi Galvani (1737-1798), médecin et physicien italien, passe toute sa vie à Bologne où il découvre les effets de l'électricité statique sur les nerfs des animaux : en touchant des cuisses de grenouilles disséquées avec un scalpel électrisé, il remarque que leurs muscles se contractent comme si les grenouilles étaient vivantes.
Alessandro Volta (1745-1827), physicien italien, professeur aux universités de Pavie et de Padoue. Il invente des appareils pour produire de l'électricité statique, étudie les gaz, découvre le méthane et invente la pile électrique, formée d'un empilement de couches de zinc et de cuivre séparées par des feuilles de carton humide.
Coulomb (1736-1806) est surtout connu pour ses travaux sur l’électricité et le magnétisme, qui marquèrent une étape majeure de l’histoire de ces deux sciences. Il fut le fondateur de l’électrostatique avec le chimiste et physicien britannique Henry Cavendish. Il étendit la conception newtonienne des forces centrales attractives et répulsives aux domaines de l’électricité et du magnétisme. Dans sa célèbre série de sept mémoires (1785-1791), Coulomb détermina les lois quantitatives d’attractions électrostatiques et magnétiques. L’énoncé de la loi de 1785 est le suivant :
« L'intensité de la force électrostatique entre deux charges électriques est proportionnelle au produit des deux charges et est inversement proportionnelle au carré de la distance entre les deux charges. La force est portée par la droite passant par les deux charges. »
L'étude de la propagation de la lumière, notamment les travaux de René Descartes, de Willebrord Snell et de Pierre de Fermat, conduisent au développement de l'optique géométrique, encore utilisée aujourd'hui pour la fabrication des lunettes et autres appareils optiques.

René Descartes (1596-1650), philosophe et mathématicien français, fondateur de la philosophie moderne et des mathématiques modernes. Il introduit en géométrie les coordonnées cartésiennes et pose ainsi les bases de la géométrie analytique : les courbes peuvent être décrites par des équations. Il découvre la loi de la réfraction de la lumière. Il est un des penseurs les plus influents de l'histoire.
Willebrord Snell (1580-1626), astronome et mathématicien hollandais, professeur à l'université de La Haye. Il mesure le rayon de la Terre et il donne une estimation plus précise du nombre π. Il découvre indépendamment de Descartes la loi de la réfraction de la lumière.
Pierre de Fermat (1601-1665), mathématicien français. Il apporte une contribution importante à la théorie des nombres (il faudra attendre 1995 pour démontrer son célèbre théorème), pose les bases de la théorie des probabilités et est précurseur du calcul différentiel. Il découvre le principe de Fermat : la lumière se propage entre deux points de manière à minimiser son temps de
parcours.
En optique encore, Christiaan Huygens et Augustin Fresnel montrent que la lumière se comporte comme une onde et expliquent les phénomènes de l'interférence et de la diffraction.
Christiaan Huygens (1629-1695), physicien et astronome hollandais. Il découvre des nébuleuses, des étoiles doubles et Titan, un des satellites de Saturne. Il comprend la structure des anneaux de ce dernier. Il pose les bases de l'optique ondulatoire en supposant que la lumière est une onde et explique ainsi les lois de la réflexion et de la réfraction de la lumière.
Augustin Fresnel (1788-1827), physicien français. Il développe la théorie ondulatoire de la lumière en étudiant les phénomènes d'interférence, de diffraction et de polarisation de la lumière. Il met au point la lentille qui porte son nom, destinée à accroître le pouvoir d'éclairage des phares.
Ces nombreux phénomènes semblaient être indépendants.
Mais en 1820, au grand étonnement des physiciens, Hans Christian Oersted (1777-1851), physicien et chimiste danois, montre qu'un courant électrique fait dévier l'aiguille de la boussole et qu'il y a donc une relation étroite entre les courants électriques et le magnétisme.
Professeur à l'Université de Copenhague. Il produisit pour la première fois l'aluminium.
André-Marie Ampère (1775-1838) fit d'importantes découvertes dans le domaine de l'électromagnétisme. Il en édifia les fondements théoriques et découvrit les bases de l'électronique de la matière. Il est également l'inventeur de nombreux dispositifs et appareils tels que le solénoïde, le télégrapheélectrique et l'électroaimant.
Ampère est considéré comme le précurseur de la mathématisation de la physique, et comme l'un des derniers savants universels. Créateur du vocabulaire de l'électricité (il inventa les termes de courant et de tension), son nom a été donné à l'unité internationale de l'intensité du courant électrique : l'ampère.

Michael Faraday (1791-1867), physicien et chimiste anglais, dont le génie expérimentateur permit d’établit le lien entre les phénomènes électriques et magnétiques : avant lui, on raisonnait en terme d'interaction à distance : on pensait que la force électrostatique entre deux charges s'établissait de façon instantanée quelle que soit leur distance. Michael Faraday introduit le concept de champ : une des charges électriques engendre un champ qui remplit tout l'espace, c'est ce champ qui agit sur la deuxième charge. L'interaction s'établit par l'intermédiaire du champ, de proche en proche. Le champ n'est pas seulement un concept mathématique mais une réalité physique ; il peut transporter de l'’énergie. L'interaction à distance entre deux charges électriques a été remplacée par le concept de champ où l'interaction se transmet de proche en proche. Le champ est une réalité physique, il peut transporter de l'énergie ou de l'impulsion.
Il découvre l'induction électromagnétique (la variation d'un champ magnétique produit un champ électrique) et construit le premier générateur électrique (la dynamo). Il découvre le phénomène de diamagnétisme et l'effet de rotation du plan de polarisation de la lumière qui porte son nom. Il établit les lois de l'électrolyse, découvre le benzène, liquéfie des gaz et introduit les nombres d'oxydation.
Enfin, en 1873, James Clerk Maxwell (1831-1879), physicien écossais, pose les bases mathématiques de la théorie électromagnétique en établissant les équations qui portent son nom : la lumière étant une onde électromagnétique, elles montrent que les phénomènes électriques, magnétiques et optiques s'expliquent par une théorie unique.
Par ailleurs il pose les bases de la théorie cinétique des gaz. C'est un des plus grands physiciens de l'histoire, avec Newton et Einstein.
Dans la théorie de Maxwell, le champ électrique et le champ magnétique sont étroitement liés. Ils peuvent coexister et se propager sous forme d'ondes électromagnétiques, parmi lesquelles la lumière.
En 1887, Heinrich Hertz (1857-1894), physicien allemand, améliora la définition du champ. Les termes "magnétiques" et "électriques" pouvant être échangés – ils produisent les mêmes effets – il le nomma "champ électromagnétique". Démontrant son indépendance des lois de la mécanique, il priva virtuellement l'éther de son principal effet. C'est à ce point de l'histoire que le champ devint synonyme d'énergie. Nous savons qu'en interrompant brusquement un champ électrique (mais aussi magnétique), il se produit une étincelle. Cela signifie que le champ contient de l'énergie. Cette découverte a des implications fondamentales dans la loi de conservation de celle-ci.
Il mesure la vitesse des ondes électromagnétiques, et montre qu'elle est égale à celle de la lumière, confirmant ainsi la théorie électromagnétique de Maxwell.
Il découvre l'effet photoélectrique, c'est-à-dire l'émission d'électrons par des métaux s'ils sont éclairés par une lumière ultraviolette. Albert Einstein expliquera plus tard ce phénomène.
Que constate-t-on dans ce résumé historique :
– Que c’est le philosophe grec Thalès de Milet, au Ve siècle avant J.C., qui observe en frottant un morceau d'ambre (elektron en grec) sur du tissu, que l'ambre acquiert une propriété inhabituelle : il attire des petits morceaux de paille. Le même phénomène d'électrisation se produit quand on se peigne les cheveux par temps sec (le peigne attire les morceaux de papier) ou quand on enlève un pull (on peut entendre ou même voir des étincelles). La foudre est la manifestation la plus spectaculaire de ce phénomène.
– Que pour l’électrostatique, phénomène d’électrisation remarqué en Grèce dès le Ve siècle av. J.C., il a fallu attendre le XVIIIe pour que deux italiens (un médecin – Galvani –, et un physicien – Volta) découvrent ses effets sur les nerfs des animaux et surtout comment le produire (pile électrique de Volta).
La France ne fut pas en reste : le physicien Coulomb, conjointement avec le chimiste et physicien anglais Cavendish, énonça en 1785, les lois d’attraction de l’électrostatique, dites lois de Coulomb.
– Qu’au XVIIe siècle, soit un siècle avant Volta et sa pile, c’est un français (Descartes) et un hollandais (Snell) qui découvrent, chacun de leur côté, le phénomène optique de réfraction de la lumière dont la formulation sera la loi dite Snell-Descartes.
C’estle français Fermat qui, à la suite (mi-dix septième siècle), découvrira un principe qui porte son nom, principe selon lequel la lumière se propage entre deux points de manière à minimiser son temps de parcours. La démonstration de son dernier théorème mathématique ne sera faite qu’en 1995 (soit près de trois siècles plus tard).
En optique encore, c’est un autre couple hollando-français, Huyghens et Fresnel, le premier au XVIIe siècle, le second deux siècles plus tard, qui poseront les bases de l’optique ondulatoire, en supposant que la lumière est une onde, d’où les lois de réflexion et de réfraction qui en découlent.
– Qu’en 1820 c’est le danois Oersted, contemporain de Fresnel, qui montre qu’un courant électrique fait dévier la boussole et qu’il y a donc une relation entre les courants électriques et le magnétisme.
– Qu’à partir de l'expérience de Oersted, le français Ampère étudie la relation entre magnétisme et électricité. Il découvre que la direction dans laquelle se déplace l'aiguille d'une boussole dépend de la direction du courant électrique qui circule à proximité et en déduit la règle dite du « bonhomme d'Ampère » : le bonhomme est couché sur le conducteur ; le courant, qui va par convention du plus vers le moins, le parcourt des pieds vers la tête ; il a les yeux dirigés vers l'aiguille aimantée. Le pôle nord de cette aiguille se déplace alors vers sa gauche. Cette règle se représente aussi par la règle de la main droite : si l'on écarte les trois premiers doigts de la main droite de sorte que le majeur indique la direction du champ magnétique et le pouce celle du mouvement, le courant circule alors dans la direction indiquée par l'index.
La loi d'Ampère la plus connue est celle de l'électrodynamique. Elle décrit les forces que deux conducteurs parallèles parcourus par des courants électriques exercent l'un sur l'autre. Si le sens du courant est le même dans les deux conducteurs, ceux-ci s'attirent ; si le courant se déplace dans des sens opposés, les conducteurs se repoussent. Il décrit également la relation qui existe entre la force du courant et celle du champ magnétique correspondant. Ces travaux fondent l'électrodynamique et influencent considérablement la physique du XIXe siècle.
Ampère interprète le phénomène du magnétisme par la théorie du courant moléculaire, selon laquelle d'innombrables particules minuscules, chargées électriquement, seraient en mouvement dans le conducteur. Cette théorie est rejetée par les scientifiques de l'époque et ne parvient à s'imposer que soixante ans plus tard avec la découverte des électrons.
Outre son travail sur l'électrodynamique, il tente d'expliquer certains phénomènes chimiques par la géométrie des molécules et émet parallèlement à Avogadro l'hypothèse que le nombre de molécules contenues dans un gaz est proportionnel à son volume.
– Que cette relation que l’on pensait au départ devoir s’établir entre deux charges de façon instantanée quelle que soit la distance, correspondait en fait, selon l’anglais Faraday, à un champ qui remplissait tout l’espace et agissait sur la deuxième charge. C’est lui qui construisit le premier générateur électrique, la dynamo.
Et aussitôt après lui (six ans après sa mort), c’est un autre anglais, Maxwell, qui posa les bases mathématiques de l’électromagnétisme.
– Qu’après 1870 (1888 exactement), c’est l’allemand Hertz qui mesurera la vitesse des ondes électromagnétiques et montrant qu'elle est égale à celle de la lumière confirmera la théorie électromagnétique de la lumière de son prédécesseur. Il découvrira encore que l’effet photoélectrique est produit par l’émission d’électrons par des métaux lorsqu’ils sont éclairés par une lumière ultraviolette.
Qu’en un mot, après la première découverte en Grèce, presque toute l’Europe avait répondu présent : cinq français (Coulomb, Descartes, Fermat, Fresnel, Ampère), trois anglais (Cavendish, Faraday, Maxwell), deux hollandais (Snell, Huyghens), deux italiens (Galvani, Volta), un danois (Oersted), un allemand (Hertz) !
Il reste que si la gravitation et l'électromagnétisme ont été étudiés relativement tôt, il a fallu attendre le XXe siècle pour être en mesure d'explorer le noyau atomique et découvrir ainsi les interactions forte et faible.