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Parcours bergsonien - Notes philosophiques de Charles Péguy (V)




Notes philosophiques[1] de Charles PÉGUY (V)

(1873-1914)

LE BERGSONISME






I/ Dans une grande philosophie, il y a un temps de méthode et un temps de métaphysique


(1340) Je ne veux point dans cette simple note entrer dans le fond du débat bergsonien. Si je puis le faire un jour je parlerai en chrétien et en catholique. Je parlerai sans autorité, mais je ne parlerai pas sans entente et sans entendement. Que la bataille qui s’est livrée autour de Bergson soit à ce point furieuse, c’est dans l’ordre. Mais qu’elle soit à ce point livrée à l’envers, c’est une véritable gageure. On aurait beaucoup fait, on aurait peut-être tout fait si seulement on forçait les combattants à occuper leurs véritables lignes de bataille. Acies suas, non alienas, non contrarias, instruere.

Aujourd’hui je ne veux que marquer des temps. De même que Hugo est classique au premier temps, et romantique eu deuxième, de même une philosophie peut être à plusieurs temps et elle est généralement à plusieurs temps. Il y a aussi l’histoire. Quoi qu’on pense métaphysiquement du système cartésien, quand Descartes a fait éclater sa méthode, cum irrupisset, quand il avait fait entrer par irruption sa méthode, il avait conquis sa part dans l’histoire éternelle. Quoi qu’on pense métaphysiquement du système bergsonien, quand Bergson a fait jaillir sa méthode, il a conquis sa part dans l’histoire éternelle.

On se rejetterait en vain sur ce que la méthode de Descartes serait une méthode positive et que la méthode de Bergson serait une méthode purement négative. La méthode de Descartes n’est positive qu’en apparence. Et je dirai en appareil. Elle (1341) revient essentiellement à remonter violemment une pente et à la faire remonter à l’esprit. Je dirai à la faire remonter à l’homme. Et la méthode bergsonienne revient essentiellement à remonter vivement une pente et à la faire remonter vivement à l’homme et à l’esprit.

Dans le sens où le cartésianisme a consisté à remonter la pente du désordre, dans le même sens le bergsonisme a consisté à remonter la pente du tout fait.

Toute grande philosophie a un premier temps, qui est un temps de méthode, et un deuxième temps, qui est un temps de métaphysique. Quand on dit que le platonisme est une philosophie de la dialectique, et le cartésianisme une philosophie de l’ordre, et le bergsonisme une philosophie du réel, on les prend tous les trois dans leur temps de méthode. Quand on dit que le platonisme est une philosophie de l’idée, et le cartésianisme une philosophie de la substance, et le bergsonisme une philosophie de la durée, on les prend tous les trois dans leur temps de métaphysique.



II/ Quand une idée simple prend corps, il y a révolution


Le cartésianisme a été une rupture violente. Le bergsonisme a été une rupture, une

déliaison vive et comme acharnée. Il y a certainement dans le bergsonisme comme un acharnement qu’il n’y a point dans le cartésianisme. Mais c’est que peut-être la rupture, la déliaison qu’il s’agissait d’opérer dans le bergsonisme était encore plus menacée, plus précaire et d’autre part plus indispensable encore que celle qu’il s’agissait d’opérer dans le cartésianisme. Nous sommes infiniment plus liés à l’esclavage du tout fait que nous ne sommes liés à l’esclavage du désordre.

L’esclavage du tout fait est infiniment plus près à nous reprendre que l’esclavage du désordre. Et il a des conséquences infiniment plus désastreuses. Dans le désordre même il peut y avoir des coups de fortune et même des coups d’ordre. Dans ce qui est fatigué, il n’y a plus ni grâce ni jaillissement. Dans tout ce qu’il peut y avoir de mauvais, l’habitude est ce qu’il y a de pire. Le cartésianisme ne remontait, ne refoulait qu’une habitude qui était l’habitude du désordre. Le bergsonisme a entrepris de refouler toute l’habitude comme telle, toute l’habitude organique et mentale.

(1342) Et cela dans tous les ordres, dans toutes les disciplines que nous avons échelonnées au commencement de cette étude[2].

On a vu des batailles gagnées dans le désordre même, et par le désordre, des pratiques en avant. On n’a jamais vu des fatigues et des vieillesses donner par erreur des œuvres de nouveauté.

Il peut y avoir dans le désordre une certaine fécondité. L’habitude et le vieillissement essaient en vain de jouer le jeune homme.


C’est çà qu’on nomme une révolution, ce grand effort momentanément couronné. L’homme dans son fauteuil qui voit une révolution, fût-ce une révolution mentale et qui dit : C’est pas malin, lui-même n’a rien dit. La question, dans cet ordre n’est pas que ce soit malin. C’est que ce soit, à un certain moment de l’histoire du monde, entré dedans. Les plus grandes révolutions, dans tous les ordres, n’ont point été faites avec et par des idées extraordinaires, et c’est même le propre du génie que de procéder par les idées les plus simples. Seulement en temps ordinaire, les idées simples rôdent comme des fantômes de rêve. Quand une idée simple prend corps, il y a révolution. La révolution cartésienne a consisté à arrêter la descente, à remonter l’habitude du désordre. La révolution bergsonienne a consisté à arrêter toute la descente, à remonter toute l’habitude organique et mentale.

Il en est ainsi dans tous les ordres. Ce qu’il y a de plus contrarié au salut même, ce n’est pas le péché, c’est l’habitude. Des milliers de créanciers répètent machinalement les effrayantes paroles. Et dimitus nobis debita nostra, sicut et nos dimittimus demutoribus nostris. Qu’un seul tout à coup, subitement éclairé, les prenne au sérieux, ces paroles, les laisse comme lui entrer dedans, c’est instantanément la plus grande révolution qu’il puisse actuellement y avoir, car c’est une révolution dans le règne de l’argent, c’est une subversion du règne de l’argent. Et c’est encore un homme de sauvé.

Tout est dans l’incorporation, dans l’incarcération, dans l’incarnation. Et ici encore et en ceci même nous sommes forcés de parler le langage bergsonien et en (1343) ceci on n’en parlera jamais d’autre. Tout est dans l’insertion et l’insertion est extrêmement rare. De Dieu, il n’y a eu qu’une incarnation, et des idées mêmes il y a bien peu d’incorporations. Quand au lieu de regarder une idée en l’air, tout à coup elle est prise au sérieux, c’est cela qui est, et qui fait, une révolution. Et l’histoire ne compte que trois ou quatre de ces grands ébranlements.



III/ Le bergsonisme a été un nouveau rationalisme


Discours de la méthode pour bien conduire sa raison et pour chercher ou pour trouver la vérité dans les sciences. Le bergsonisme est aussi une méthode pour bien conduire sa raison. Le bergsonisme aussi a une raison. Le bergsonisme est aussi un parti de la raison. On ne voit pas ce que serait une philosophie qui ne serait pas un parti de la raison. Le bergsonisme prétend, entend même servir encore mieux la raison, car il entend pour ainsi dire la servir encore de plus près. Toute philosophie est évidemment et essentiellement un rationalisme. Même une philosophie qui serait, ou qui voudrait être, contre la raison, serait quand même rationaliste. Une philosophie ne peut jamais apporter que des raisons. Le cartésianisme a été dans son principe un effort pour conduire la raison à la recherche de la vérité dans les sciences, (mais par sciences Descartes entendait évidemment une partie de ce que nous nommons métaphysique, et au moins les métaphysiques des sciences). Le bergsonisme a été dans son principe un effort pour conduire la raison à l’étreinte de la réalité. (Dans les sciences, dans les métaphysiques des sciences, dans la métaphysique). Déjà le platonisme avait été dans son principe un effort pour conduire la raison par la dialectique idéale ou si l’on veut idéique à la source même de l’être. Le bergsonisme a été un effort aussi grand, un effort du même ordre, et je dirai un effort dans le même sens. Il n’y a pas plus de philosophie contre la raison qu’il n’y a de bataille contre la guerre, d’art contre la beauté, de foi contre Dieu. Le bergsonisme n’a jamais été ni un irrationalisme ni un antirationalisme. Il a été un nouveau rationalisme et ce sont les grossières métaphysiques que le bergsonisme a déliées (métaphysiques matérialistes,métaphysiquesmédico-légales,métaphysiquesneuro-physiologiques, métaphysiques sociologiques et bien d’autres) qui étaient des (1344) durcissements, des scléroses, des raidissements, des ankyloses, étaient littéralement des amortissements de la raison. Toutes ces métaphysiques étaient des sabotages par durcissement de la raison. Elles étaient des esquilles ou des eschares. Le bergsonisme est si peu contre la raison que non seulement il a fait jouer les vieilles articulations de la raison mais qu’il en fait jouer des articulations nouvelles.



IV/ Principes féconds face à des principes superfétatoires


Les fameuses règles de Bacon[3] n’ont introduit dans l’histoire du monde aucune fécondité. Nous ne leur devons rigoureusement rien. Ni une invention, ni une découverte, ni un mouvement de la pensée. Tous ceux qui depuis les premiers balbutiements de la pensée grecque avaient fait une invention, une découverte, un mouvement avaient sans y penser appliquer les règles de Bacon. Tous ceux avant Bacon. Mais depuis Bacon tout homme qui se lèverait de bon matin avec le ferme propos d’appliquer les règles baconiennes, et qui n’aurait que ce ferme propos, qui ne ferait jouer que ce ferme propos, ce tout homme ne ferait pour cela ni une invention, ni une découverte, ni un mouvement de la pensée. Et on n’a jamais vu une invention, une découverte, un mouvement de pensée sortir de la contemplation des œuvres de Bacon. Et voilà une belle application, et non la moins importante des tables de présence et d’absence, et des variations concomitantes.

Si j’étais un grand philosophe, je n’aurais peut-être pas le droit de raconter l’histoire suivante. D’autant que ce n’est pas une histoire et que c’est encore un mot de soldat. Mais je ne suis qu’un pauvre moraliste. Quand donc il y en avait un, au 131e de l’arme[4], qui se travaillait trop ostensiblement (à faire un mouvement), (à faire un mot), il y en avait toujours un autre qui disait froidement : Surtout n’oublie pas de respirer. Tous ceux qui ont fait quelque chose dans le monde sont des types qui n’ont pas oublié de respirer. Mais on n’a rien fait dans le monde uniquement parce qu’on s’était proposé de ne pas oublier de respirer.

Discours de la méthode pour bien conduire, c’est vraiment, c’est littéralement une méthode pour éviter l’inconduite, la mauvaise conduite. Et alors, si l’on veut, (1345) ce n’est rien, parce qu’on a toujours voulu éviter l’inconduite en matière de pensée, et si l’on veut c’est tout, parce que c’est un des trois ou quatre grands ébranlements qui se soient jamais produits dans l’histoire de la pensée. Si l’on veut, ce n’est rien parce qu’il s’était toujours agi d’éviter l’inconduite en matière de pensée. Et si l’on veut c’est encore moins rien, parce qu’on ne l’a pas plus évitée après qu’avant, et que Descartes ne l’a pas plus évitée qu’un autre, (et c’est en ce sens que j’ai dit que Bergson est un infiniment bergsonien que Descartes n’est un bon cartésien[5]). Et pourtant si l’on veut c’est tout, parce que c’est le cartésianisme.

Et encore dans ce discours de la méthode il n’y a qu’une partie, sur six, la deuxième qui soit des règles de la méthode. En tout, sept pages et demie. Et dans cette deuxième partie même il n’y a que le cœur, en tout vingt lignes qui soient les règles de la méthode. Ce sont ces vingt lignes qui ont révolutionné le monde et la pensée. Valmy aussi est une petite bataille, un duel d’artillerie, je veux dire livrée avec de petits effectifs, et même pas livrée du tout, avec presque pas de morts et de blessés.



V/ Souplesse plutôt que raideur


C’est un préjugé, mais il est absolument indéracinable, qui veut qu’une raison raide soit plus une raison qu’une raison souple ou plutôt qui veut que de la raison raide soit plus de la raison que de la raison souple. C’est un préjugé qui a cours et qui fleurit sur toute la ligne. Il règne, il est indéracinable dans toutes les disciplines que nous avons échelonnées au commencement de cette note. C’est le même préjugé qui veut qu’une logique raide soit plus une logique qu’une logique souple. Et qu’une méthode scientifique raide soit plus une méthode, et plus scientifique, qu’une méthode scientifique souple. Et surtout qu’une morale raide soit plus une morale et plus de la morale, qu’une morale souple. C’est comme si on disait que les mathématiques de la droite sont plus des mathématiques que les mathématiques de la courbe.

Il est évident au contraire que ce sont les méthodes souples, les logiques souples, les morales souples qui sont les plus sévères, étant les plus serrées. Les logiques raides sont infiniment moins sévères que les logiques souples, étant infiniment moins serrées. Les morales raides sont infiniment moins sévères que les morales (1346) souples, étant infiniment moins serrées. Une logique raide peut laisser échapper des replis de l’erreur. Une méthode raide peut laisser échapper des replis de l’ignorance. Une morale raide peut laisser échapper des replis du péché, dont une morale souple au contraire épousera, dénoncera, poursuivra les sinuosités d’échappements. C’est une logique souple, une méthode souple, une morale souple qui poursuit, qui atteint, qui dessine les sinuosités des fautes et des déficiences. C’est une morale souple qui épuise les sinuosités des défaillances. C’est dans une morale souple que tout apparaît, que tout se dénonce, que tout se poursuit. Dans un compartimentage raide il peut y avoir impunément des manques, des creux, des faux plis. La raideur est essentiellement infidèle et c’est la souplesse qui est fidèle. C’est la souplesse qui dénonce. Contrairement à tout ce que l’on croit, à tout ce que l’on enseigne communément, c’est la raideur qui triche, c’est la raideur qui ment. Et c’est la souplesse non seulement qui ne triche pas, non seulement qui ne ment pas, mais qui ne laisse pas tricher et ne laisse pas mentir. La raideur au contraire permet tout, elle ne signale rien. Dans une malle moderne vous pouvez empiler tous les voiles de lin de la supplication antique. Si ces voiles font des faux plis à l’intérieur de la malle, rien n’en paraît sur le couvercle.

Beaucoup de contre sens que l’on voit qui se répandent ou plutôt un contre sens global que l’on voit qui se répand sur le bergsonisme, sur l’ancien et le moderne, sur le classique et le romantique tomberait si l’on voulait bien déclasser le raide du ferme et du dur. Ce sont les morales raides où il peut y avoir des niches, à poussières, à microbes, des moisissures et des creux de pourriture, dans des coins dans des raideurs, des dépôts, lues, et ce que nos Latins nommaient situs, une moisissure, une saleté venant de l’immobilité, d’être laissé là. Une saleté pour avoir été laissé là. Et ce sont les morales souples au contraire qui exigent un cœur perpétuellement tenu à jour. Un cœur perpétuellement pur. Nous nous sommes lavés d’une telle amertume. De même que ce sont les méthodes souples, les logiques souples qui requièrent un esprit perpétuellement tenu à jour, un esprit perpétuellement pur. Ce sont les morales souples et non pas les morales raides qui (1347) exercent les contraintes les plus implacablement dures. Les seules qui ne s’absentent jamais. Les seules qui ne pardonnent pas. Ce sont les morales souples, les méthodes souples, les logiques souples qui exercent les astreintes impeccables. C’est pour cela que le plus honnête homme n’est pas celui qui entre dans des règles apparentes. C’est celui qui reste à sa place, travaille, souffre, se tait.



VI/ La mort spirituelle, selon l’Eglise, est le résultat d’un endurcissement ; les théories bergsoniennes de la mémoire et de l’habitude sont proches parentes de ce constat


(1402) On connaît cette parole de vieil homme et que pour ma part je trouve admirable. – Quel dommage, disait-il, qu’il faille mourir. (Il ne pensait qu’à sa mort physique, car un homme capable d’une aussi douce parole, et aussi profondémentinnocente,neportaitévidemmentaucunetracedesonendurcissement de l’âme qui aboutit à la mort spirituelle.) – Quel dommage, disait-il qu’il faille renoncer à la vie. Depuis le temps, je commençais à m’y habituer.

Il ne croyait pas si bien dire. C’est précisément parce qu’il achevait de s’y habituer qu’il aboutissait aussi aux achèvements de la mort.

Que d’autres recherchent des querelles littérales. La lettre tue. Pour moi, comment ne pas voir déjà, et en attendant peut-être tant d’autres aspects, comment ne pas voir une parenté profonde, un mystérieux accord dans la profondeur de pensée, comment ne pas voir une démarche et un approfondissement parallèle entre cette vieille formule traditionnelle de l’enseignement de l’Eglise, que la mort spirituelle est le résultat d’un endurcissement et ces théories profondes de la mémoire et de l’habitude qui sont une des irrévocables conquêtes de la pensée bergsonienne...

(1404) Car il a fallu que la pensée bergsonienne vint dans le temps. il a fallu que la pensée bergsonienne vint dans l’histoire du monde et que fussent enfin pénétrées au fond les réalités métaphysiques de la matière, de la mémoire, de l’habitude, du vieillissement, du durcissement, pour que fût éclairée et pénétrée cette liaison profonde de la mémoire, de l’habitude, du vieillissement, du durcissement à la mort.

Grâce à Bergson et à la pensée bergsonienne quand nous parlons de la matière et de la mémoire, quand nous parlons de la liaison de la matière et de la mémoire, quand nous parlons de l’habitude, du vieillissement, du durcissement, nous savons enfin ce que nous disons, nous le savons au juste, nous le savons au fond ; et par là et en cela nous connaissons le mécanisme de l’acheminement à la mort spirituelle ; et par là et en cela nous connaissons le mécanisme de cette hébétude, de cet émoussement d’habitude qui rend, qui finit par rendre une âme imperméable aux infusions de la grâce.

C’est dire que par là et en cela nous connaissons le mécanisme de cette limitation de la grâce, ou enfin de l’action de la grâce, qui est devenu, qui fait présentement l’objet de notre malheureuse étude.

Car du bois mort est du bois tout envahi de tout fait, tout entier occupé, tout entier consacré au tout fait, tout entier dévoré de tout fait, tout entier consommé pour ainsi dire par l’envahissement du tout fait. Tout entier racorni, tout entier momifié ; plein de son habitude et plein de sa mémoire. C’est un bois qui est arrivé à la limite de cet amortissement. C’est un bois dont toute la matière a été gagnée peu à peu par ce vieillissement. C’est un bois dont toute la souplesse a été mangée peu à peu par ce raidissement, dont tout l’être a été sclérosé peu à peu par ce durcissement. C’est un bois qui n’a plus un atome de place, et plus un atome de matière, pour du se faisant. Pour faire du se faisant. Aussi il n’en forme plus, il n’en fait plus.

Pareillement une âme morte est une âme toute entière envahie de tout fait, toute entière occupée, toute entière consacrée eu tout fait, toute entière consommée (1405) pour ainsi dire par l’envahissement du tout fait. Toute entière racornie, toute entière momifiée ; pleine de résidus, pleine de son débris ; pleine de son habitude et pleine de sa mémoire. C’est une âme qui est arrivée à la limite de cet amortissement. C’est une âme dont toute la matière pour ainsi dire, toute la matière spirituelle a été gagnée peu à peu par ce vieillissement…

Du bois mort est du bois résiduel à la limite. Une âme morte est une âme résiduelle à la limite.

Dans ce système le germe au contraire est à la limite à l’autre bout. Le germe est ce qui est résiduel au minimum ; ce qui est du tout fait au minimum ; ce qui est de l’habitude et de la mémoire au minimum.

Et ainsi du vieillissement, du raidissement, du durcissement, de l’amortissement au minimum.

Et ainsi de la liberté au contraire, du jeu, de la souplesse et de la grâce au maximum et à la limite.

Le germe est ce qui est le moins habitué. C’est ce où il y a le moins de matière accaparée, fixée par la mémoire et par l’habitude…

(1406) C’est ce où il y a le moins de dossiers, le moins de mémoires.

Le moins de paperasseries, le moins de bureaucratie.

Ou encore c’est ce qui est le plus près de la création ; ce qui est le plus récent, au sens du mot latin recens.

Ce qui est le plus frais. Le plus récemment sorti, le plus sorti des mains de Dieu.

Une âme morte est une âme qui a été totalement envahie par ses dossiers, par l’accumulation de ses mémoires…

(1407) Une âme morte est une âme qui a succombé sous l’accumulation de sa paperasserie ; de sa bureaucratie.

Ou enfin c’est une âme qui est le plus loin de la création ; la moins récente ; la moins fraîche, la plus décréée. La moins sortie, la plus éloignée de sortir des mains de Dieu.

Et quand on dit que l’Eglise a reçu des promesses éternelles, qui se rassemblent en une promesse éternelle, il faut entendre rigoureusement par là qu’elle a reçu la promesse qu’elle ne succomberait jamais sous son propre vieillissement, sous son durcissement, sous son raidissement, sous son habitude et sous sa mémoire.

Qu’elle ne serait jamais du bois mort et une âme morte ; qu’elle n’irait jamais jusqu’au bout d’un amortissement aboutissant à la mort.

Qu’elle ne succomberait jamais sous ses dossiers et sous son histoire.

Que ses mémoires ne l’écraseraient jamais totalement.

Qu’elle ne succomberait jamais sous l’accumulation de sa paperasserie, sous la raideur de sa bureaucratie.

Et que les saints rejailliraient toujours.



VII/ Le présent


(1486) Le ministère du présent n’est pas seulement un ministère de date. Il n’est pas seulement un ministère chronologique.

Le présent est un certain point d’une nature propre. Il est un point de nature et un point de pensée.

Le ministère du présent n’est pas seulement de regarder passer. Il est de faire passer.

Il n’est pas seulement le spectateur, qui regarde passer le temps. Il est le centre et

l’agent même et le point de passée du temps.

Le point de passage est déjà en même temps le point de passée.

(1487) Le présent n’est point inerte. Il n’est pas seulement spectateur et témoin. Il est un point d’une nature propre et tout passe par ce point et Jésus même, étant homme et temporel, y a passé et l’advenue, l’évènement, la survenue de Jésus sur Moïse, de la nouvelle loi sur l’ancienne loi, du monde chrétien sur le monde antique, de la grâce sur la nature, des Evangiles sur les prophéties n’est pleinement évaluable et pleinement saisissable, sinon pleinement intelligible que pour celui qui a considéré la singulière advenue, l’évènement, la survenue du futur sur le passé par le ministère du présent. Ce qu’il y a de propre et de libre dans cette advenue, dans cette survenue est au germe de ce qu’il y a de singulier et de propre dans l’évènement de ce qui n’était qu’une annonce, dans la tenue de ce qui n’était qu’une promesse.

Mais je le demande à présent quelle est la philosophie qui pour la première fois dans l’histoire du monde a attiré l’attention sur ce qu’avait de propre l’être même et l’articulation du présent. Quelle philosophie, sinon la philosophie bergsonienne.

Quelle philosophie, quelle pensée a non seulement la première attiré l’attention mais la première allée la plus avant. Qui a vu que là même était le secret du problème, que la déliaison du mécanisme était là, que la déliaison du déterminisme était là, que la déliaison du matérialisme était là. Qui a vu qu’en ce point était tout le secret de la bataille. Et que tant qu’on considérerait le présent comme une simple date, comme les autres, parmi les autres, après d’autres, avant d’autres, tant que l’on considérerait le présent comme le passé d’aujourd’hui, comme le passé instantané, comme le instantanément passé, comme la limite en par ici du passé, comme le passé à la limite en par ici, comme le plus récent et l’instantanément et le à la limite enregistré ou demeurant lié soi-même dans les ligatures raides du déterminisme, du matérialisme, du mécanisme. Car on prenait le présent à l’envers. On prenait ce point du présent de l’autre côté. Car on le prenait comme la dernière ligne inscrite, on le prenait comme le dernier point (1488) acquis, comme le dernier point de l’inscription. Au lieu qu’il est le premier point non encore engagé, non encore arrêté, le point encore en cours d’acquisition, en cours d’inscription, la ligne en cours qu’on l’écrive et qu’on l’inscrive. Il est le point qui n’a point encore les épaules dans les momifications du passé.

Au lieu de considérer le présent lui-même, le présent présent on considérait au contraire le présent passé, un présent figé, et fixé, un présent arrêté, inscrit, un présent rendu déterminé.

Un présent historique.

Au lieu de considérer ce point de secret qu’est le présent on considérait déjà une histoire du présent, une mémoire du présent, c’est-à-dire que l’on considérait la figure que ferait le présent aussitôt qu’il serait devenu passé. On considérait l’inscription aussitôt qu’elle serait devenue inscrite. On considérait la vie au moment qu’elle serait devenue la mort. Et on trouvait qu’elle était morte. On considérait le présent, on considérait la liberté au moment qu’elle aurait été liée, qu’elle serait devenue liée. Et on trouvait qu’elle était liée.

Mais on ne disait pas qu’elle était liée parce qu’on l’avait liée. On disait qu’elle était venue au monde comme ça. On disait qu’elle était venue au monde liée.

On ne disait pas que l’inscription était inscrite parce qu’on l’avait inscrite. On disait qu’elle était venue au monde comme ça. Puisqu’on la trouvait comme ça. On disait qu’elle était venue au monde inscrite.

On ne disait pas que la vie était morte parce qu’on l’avait tuée. On disait qu’elle était venue au monde comme ça. Puisqu’on la trouvait comme ça. On disait que la vie était venue au monde morte.

On ne disait pas que la liberté paraissait liée parce que soi-même on était passé, on s’était mis de l’autre côté du lien et qu’ainsi, on la voyait à travers le lien. On disait qu’elle était liée.

On ne disait pas que l’inscription paraissait morte parce que soi-même on était passé de l’autre côté de l’inscrit et qu’ainsi on la voyait à travers l’inscrit. On disait qu’elle était inscrite.

(1489) On ne disait pas que la vie était morte parce que soi-même on était passé de l’autre côté de la mort et qu’ainsi on la voyait, la vie, à travers la mort. On disait sans le savoir, sans savoir ce qu’on disait, qu’elle était morte.

Car, continuant à la nommer vie, on en parlait toujours comme d’une morte, on la voyait toujours comme une morte.

Au lieu de considérer la liberté, la vie, le présent un instant avant qu’elle entre dans l’éternelle prison du passé, en la considérant aussitôt après, instantanément après qu’elle venait de signer sur le registre d’écrou. Et on disait qu’elle était serve, et qu’elle était prisonnière, et qu’elle était écrouée.

On croyait qu’en allant vite, qu’à force d’aller vite on pouvait impunément prendre pour le présent un tout récent passé et parler comme du présent d’un tout récent passé, qu’on n’y verrait rien ; que ça revenait au même ; qu’à force d’aller vite ça ne se verrait pas. Qu’en se dépêchant beaucoup on arriverait en même temps qu’on était parti. Que l’intervalle n’existerait pas. Que la liberté au dernier moment dans la rue et la prisonnière au dernier moment dans la prison, que la liberté s’avançant sous la porte, la prisonnière venant de signer sur le registre d’écrou, c’était pour ainsi dire le même être et que par conséquent et par glissement c’était évidemment et absolument le même être.

Il n’y a que l’être et la réalité qui trouvaient que ce n’était pas le même être[6].

C’est toujours la même tentation intellectuelle, la même tentation offerte au même glissement, à la même profonde paresse intellectuelle. Comme c’est le passé qui retient, et même comme il n’y a que le passé qui retient, et comme on croit que retenir c’est savoir mieux, et même comme absolument on croit que retenir c’est (mieux) tenir et que retenir c’est savoir, c’est toujours au passé que l’on s’adresse.

Seulement on croit qu’en le prenant dans sa grande épaisseur, dans toute son épaisseur, c’est bien effectivement le passé, tandis qu’en l’amincissant assez par le bord où il touche au futur, on en fait le présent. On obtient le présent.

C’est-à-dire : on croit qu’en prenant la mémoire dans toute son épaisseur on obtient l’histoire, mais qu’en l’amincissant assez du côté qu’elle naît, qu’elle vient (1490) de naitre, on obtient encore le présent et la connaissance du présent.

C’est-à-dire : on croit qu’en prenant la servitude dans toute son épaisseur on obtient bien en effet le déterminisme mais qu’en l’amincissant assez du côté qu’elle naît, qu’elle vient de naître on obtient encore la liberté.

Ainsi on aboutit à un présent qui est une lamelle du passé à la limite du passé. (A la limite comme présente, à sa limite du côté du futur).

On aboutit à une connaissance du présent qui est une lamelle d’histoire.

On aboutit à une lamelle de liberté qui est une lamelle de servitude.

Au lieu que le présent est ce qui n’est pas encore passé, la connaissance du présent est ce qui n’est pas encore de l’histoire, la liberté, le libre est ce qui n’est pas encore écroué.

Le présent n’est pas ce qui est historiquement sur une très mince épaisseur. C’est ce qui n’est pas historique du tout.

Le présent n’est pas ce qui est écroué depuis peu et sur une mince épaisseur (de temps, de prison). C’est ce qui n’est pas écroué du tout.

C’est ce qui est d’une autre nature, d’un autre être que l’historique, d’un autre être que l’inscrit, d’un autre être que l’écroué.

Et eux comment s’étonner qu’ils trouvassent passées des lamelles de passé,

historiques des lamelles d’histoire, écrouées, déterminées des lamelles de servitude.

Mais c’est peut-être bien ce qu’ils voulaient.

C’est le danger terrible, c’est le commandement terrible du passé. Lui seul peut tenir des registres. Et comme tout le monde a besoin de registres, c’est toujours à lui que l’on s’adresse. Lui seul est fabricant de registres. Et il en est marchand. Et tout le monde s’affole et court lui en demander.

Il est fonctionnaire de l’enregistrement. Et comme tout le monde croit que toute science et que toute connaissance est enregistrement, on se précipite vers les enregistrements de l’histoire.

C’est ici le centre même du sophisme. D’une part il ne peut y avoir enregistrement et histoire que du passé. D’autre part on pose (plus ou moins explicitement) que (1491) toute science et connaissance est enregistrement et histoire. Après ça on parle de science et de connaissance du présent.

Et on entend la même science et la même connaissance.

C’est donc impliciter que le présent est un passé.

Comment s’étonner après cela qu’on le trouve passé.

Mais c’est peut-être, plus ou moins obscurément, ce que l’on voulait.

Car cette confusion du présent au passé, cette réduction du présent au passé était la colle qui faisait tenir le déterminisme, et le matérialisme et l’intellectualisme.


Et non seulement cela. Non seulement les registres sont des registres, mais ils sont des registres du passé. Alors tout ce besoin de repos et de tranquillité et de ne plus en entendre parler qui vient de la fatigue et qui se nomme proprement la paresse et notamment la paresse intellectuelle, et ce besoin d’officiel et de contrôle et d’authentique et de bien et dûment enregistré, tout le besoin du papier et au deuxième degré tout le besoin du papier timbré travaille pour cette substitution frauduleuse et pour cette confusion et pour cette réduction.

Avoir la paix, le grand mot de toutes les lâchetés civiques et intellectuelles. Tant que le présent est présent, tant que la vie est vivante, tant que la liberté est libre elle est bien embêtante, elle fait la guerre. On parle d’elle ; et il faut que l’on en parle. C’est même le moment d’en parler. Si seulement le présent est passé, tout s’apaise.

On n’en entend plus parler.

Et au fond c’est ce que tout le monde veut.

On a la paix.

Telle est la grande tentation offerte à la paresse intellectuelle et à la nommée sagesse, et à la nommée prudence. Et à la sainte épargne et à la sainte économie. Et surtout à la morale, qui profite toujours. Et qui est celle qui tombe toujours.



[1] Extrait de « Notes sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne », La Pléiade, pp. 1340-1347.

[2] (1315) Il y a des ordres, il y a des royaumes, il y a des règnes, il y a des disciplines. Il y a la foi ; il y a l’amour ; il y a l’art ; il y a la philosophie ; il y a la morale ; il y a la science. Et sans doute il y en aurait (1316) d’autres, et même il.faudrait dire qu’il n’y a pas seulement des royaumes : il y des provinces. Et qui sont peut-être autant séparées que des royaumes. Car il n’y a peut-être rien qui soit aussi contraire aux arts plastiques que les arts musicaux. Et il n’y a peut-être rien qui soit aussi contraire aux « sciences » mathématiques que les « sciences » naturelles. Et dans la morale, je distinguerais peut-être une civique qui aurait mes préférences.

Le bergsonisme n’est pas une géographie, c’est une géologie…Il s’agit d’approfondir l’un et d’approfondir l’autre…

(1319) Cessons donc d’attribuer certaines qualités à certains ordres comme des pardessus. Mais poursuivons parallèlement à l’intérieur des différents ordres et sachons reconnaître les qualités parallèles.

Cessons donc aussi, et indépendamment de leur situation dans les ordres, de considérer comme contradictoires en elles-mêmes des qualités qui précisément ne sont contradictoires que dans les classements des intellectuels. Où a-t-on jamais vu que le clair exclut le profond ou que le profond exclut le clair. Ils s’excluent dans les livres, dans les didactiques, dans les manuels. Ils ne s’excluent ni dans la nature ni dans cette autre nature qu’est la grâce ».

[3] Selon Francis Bacon (1561-1626), l’anthropologie traite du corps, mais aussi des fonctions psychiques de l’homme. Elle est aussi conduite à l’étude du processus logique et en particulier à l’examen des méthodes d’invention. C’est à ce propos qu’il formule son Novum Organum, méthode qui procède « des expériences vers les axiomes », pour ensuite combiner des expériences nouvelles à partir des axiomes formulés. C’est alors que les limites de la pensée de Bacon sont les plus apparentes : s’il voit très clairement qu’il faut distinguer l’expérience vulgaire de l’expérimentation scientifique, il est ignorant des travaux scientifiques de son temps et ne comprend pas le rôle de la mathématisation de la nature dans la science. S’il voit bien que le vrai doit se conquérir contre des formations idéologiques préscientifiques, il se borne à nommer les idéologies (idoles de la tribu, de la caverne, du forum, du théâtre).

[4] 131e régiment d’infanterie où Péguy s’était engagé en 1892, où il a servi, jusqu’à ce qu’il fut promu sous-lieutenant et affecté au 76e à Coulommiers.

[5] (1326) Descartes et Bergson sont hommes. Ont-ils obtenu, obtiendront-ils une réussite totale. On ne voit pas que les philosophes soient destinés à réussir totalement plus que César ou Napoléon. Mais il serait aisé de montrer que Bergson est infiniment meilleur bergsonien que Descartes ne fut bon cartésien. Et je dirai : il est aisé de montrer que Bergson est infiniment un meilleur bergsonien que Descartes ne fut un bon cartésien. Je vois partout dans Bergson le souci de la considération du réel pur. Et dans Descartes je vois de biens grands désordres.

[6] « C’est cette capitale idée bergsonienne que le présent, le passé le futur ne sont pas du temps seulement, mais de l’être…Que le futur n’est pas seulement du passé pour plus tard, Que le passé n’est pas de l’ancien futur, du futur de dedans le temps. Mais que la création, à mesure qu’elle passe, qu’elle tombe du futur au passé, par le ministère, par l’accomplissement du présent ne change pas seulement de date, mais qu’elle change d’être…Que le passage par le présent est le revêtement d’un autre être. »




Date de création : 26/01/2010 @ 11:34
Dernière modification : 26/01/2010 @ 20:52
Catégorie : Parcours bergsonien
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